Caïn – dévoré par l’envie
série : Comme toi et moi | Texte biblique : Genèse 4,1–15
Pourquoi y a‑t-il tant d’injustice dans ce monde ? Ou bien Dieu est-il injuste ? Caïn s’est senti inférieur à son frère Abel et n’a pas été respecté. Profondément blessé et rongé par la jalousie, il a laissé libre cours à la violence et a tué son frère. Dieu lui avait pourtant montré comment mieux gérer ses sentiments négatifs. Pourtant, Dieu a donné une seconde chance à Caïn. Il doit vivre, certes marqué, mais vivre.
Aie pitié de nous, Seigneur. Pourquoi une personne est-elle frappée par le diagnostic d’une maladie incurable ? Pourquoi est-ce justement à elle que cet accident de la route arrive ? Pourquoi cet enfant doit-il grandir dans des conditions familiales si difficiles ? Pourquoi cette personne, qui se trouve déjà du côté obscur de la vie, subit-elle ce coup du sort ? La vie est injuste. Peut-être même devrons-nous dire : Dieu est injuste ! Il facilite la tâche à l’un et la rend indiciblement difficile à l’autre.
Dieu est injuste
Dans l’histoire de Caïn et Abel, il s’agit de questions de ce genre. Il s’agit de toi et de moi. Pour ainsi dire, il s’agit de l’étoffe dont est faite la vie. «Adam coucha avec sa femme Eve et elle devint enceinte. Elle mit au monde Caïn (= gain, acquisition) et dit : «Avec l’aide du Seigneur, j’ai mis au monde un homme». Plus tard, elle mit au monde un deuxième fils et l’appela Abel (= éphémère, futile). Abel devint un berger, Caïn un agriculteur. Au bout d’un certain temps, Caïn offrit une partie de sa récolte au Seigneur. Abel lui offrit également des agneaux premier-né de son troupeau et de leur graisse. L’Éternel regarda Abel avec bienveillance et accepta son offrande, mais il rejeta Caïn et son offrande.» (Genèse 4,1–5a NL).
Une mauvaise expérience en termes simples. Deux personnes font la même chose : l’une arrive et est remarquée, l’autre est ignorée, échoue et ne sait pas pourquoi. Les deux veulent faire la même chose, c’est-à-dire remercier Dieu et lui faire plaisir par l’offrande. Ce faisant, ils espèrent qu’il sera à son tour bienveillant à leur égard. C’est le cycle des bénédictions. Et maintenant, ce n’est pas Caïn qui l’interrompt, mais Dieu. Il accepte le don d’Abel, mais ne prête pas attention à celui de Caïn. Nous ne savons pas en quoi consistait ce fait d’être vu ou de ne pas être vu, s’ils l’ont vu, entendu – ou peut-être simplement ressenti. Peut-être Caïn le remarque-t-il aussi dans toute son existence : au fait que le travail laborieux dans les champs est resté infructueux cette année. Il suffit à peine à subvenir à ses besoins, alors que le troupeau d’Abel a particulièrement bien mis bas cette année. Un sentiment effrayant s’empare de Caïn : ma vie est un échec et Abel brille de joie. C’est incompréhensible et presque insupportable. Pourquoi Dieu rend-il les choses faciles pour les uns et indiciblement difficiles pour les autres ?
La comparaison est une mauvaise chose. Soit nous avons un sentiment d’oppression parce que l’autre gagne plus, a un mariage plus harmonieux, a des enfants qui réussissent bien, a une plus grande maison, etc.
Comment faire face à ces différences et à l’injustice de la vie ? Dans une parabole, Jésus parle ouvertement du fait que tous ne reçoivent pas le même nombre de talents de la part de Dieu : quelqu’un en a reçu cinq, un autre deux et un autre seulement un (Matthieu 25,14ss). Il en va de même dans la vie. Les conditions sont différentes. Qu’est-ce qu’un enfant peut faire pour grandir dans une famille intacte, alors que son camarade d’école a eu plusieurs parents d’accueil ? Pourquoi un chrétien est-il guéri à la suite d’une prière, alors qu’un autre meurt prématurément ou dans de grandes souffrances ? Pourquoi l’une trouve-t-elle toujours immédiatement un bon emploi, alors que l’autre essuie refus sur refus ?
Caïn est jaloux
Notre récit décrit la réaction de Caïn avec un regard psychologique profond. Si l’on traduit littéralement, on peut lire : «Et Caïn devint très chaud de colère et son visage tomba.» (v.5b). Il ne fait pas ça, ça l’envahit et le submerge. Psychosomatiquement, c’est le cas. Elle s’empare du corps par le biais de l’âme. Bientôt, l’envie brûle et rend le corps brûlant, chargé au maximum et voulant se décharger. Il veut rétablir la justice par la force. Sa profonde dépression laisse son visage abattu. C’est une expression de la perte d’amour : avec le visage abattu, le contact avec les autres est rompu. Pour une bonne relation, il faut avoir le visage levé, de sorte que l’on puisse se regarder dans les yeux.
Chez Caïn, le processus s’est poursuivi sans frein : «Plus tard, Caïn proposa à son frère Abel : «Viens, sortons dans les champs». Lorsqu’ils y furent, Caïn se jeta sur son frère et le frappa à mort.»(V.8 NL). Le commandement le plus important est d’aimer Dieu de tout son cœur et d’aimer son prochain comme soi-même. Adam et Eve ont transgressé l’amour de Dieu, Caïn a été le premier à transgresser l’amour du prochain. C’est une chaîne de causalité : celui qui n’aime pas Dieu ne tardera pas à échouer dans l’amour du prochain. Avant de pointer Caïn du doigt, nous devons nous rappeler que celui qui commet un meurtre est déjà celui qui a tué un autre homme. raka dit (Matthieu 5,22). Raka est un mot commun de mépris, ainsi dans la monnaie de Imbécile.
L’histoire aurait pu prendre un autre cours. Comment pouvons-nous gérer nos sentiments négatifs comme l’envie et la colère ? «Pourquoi es-tu si en colère ?», lui demanda le Seigneur. Pourquoi regardes-tu le sol avec tant de fureur ? N’est-ce pas ainsi ? Si tu as de bonnes intentions, tu peux regarder librement autour de toi. Mais si tu prévois de faire le mal, le péché te guette. Il veut te faire tomber. Mais toi, tu domineras sur eux !» (V.6+7 NL). Dieu voit Caïn, même si cela semble très différent pour Caïn. Caïn ne voit plus rien d’autre que son rejet et son affront. Tout le reste autour de lui est noyé dans l’accessoire, tant il est fixé sur sa mauvaise expérience. Il s’isole et se recroqueville sur lui-même. Pourtant, Dieu l’a déjà regardé depuis longtemps. Il peut arriver que les oiseaux de la jalousie volent au-dessus de nos têtes, nous n’y pouvons rien. Mais qu’ils fassent leur nid dans tes cheveux, tu peux l’empêcher. Pour cela, nous devrions lever les yeux et venir avec nos plaintes à Dieu ou à d’autres personnes. Car celui qui accepte l’amour de Dieu supporte de vivre dans un monde divisé. Si nous restons seuls avec nos mauvais sentiments, nous leur donnons un pouvoir énorme.
Le message important pour Caïn est le suivant : «Tu domineras sur le péché ! Personne n’est impuissant face au péché, même si celui-ci peut être très tenace. Le rapport de force est d’autant plus clair pour nous. Paul dit : «Notre vie antérieure a été crucifiée avec le Christ afin que le péché perde son pouvoir dans notre vie. Désormais, nous ne sommes plus esclaves du péché» (Romains 6,6 NL). C’est exactement ce que nous constatons dans le baptême ! Nous ne devons plus pécher, mais nous pouvons encore le faire. C’est un bon message pour nous tous – en particulier pour les personnes dont certaines habitudes ont pris un caractère addictif.
Dieu est miséricordieux
Caïn n’a pas levé les yeux, mais a persévéré dans la voie de la colère qu’il avait choisie jusqu’à la fin amère. Il attire Abel dans le champ avec un prétexte et le tue. Caïn fait alors semblant de ne rien savoir : «L’Éternel dit à Caïn : Où est ton frère Abel ? Il répondit : Je ne sais pas ; serai-je le gardien de mon frère ?» (v.9 Lut). Caïn a été le premier à offrir à ce monde une citation inoubliable. Dieu n’en parle même pas. Caïn sait très bien que c’est ce qu’il doit être : Gardien de son frère et gardien de lui-même. Une fois de plus, il apparaît clairement que la capacité relationnelle est massivement perturbée.
Caïn n’était pas trop fier pour demander l’atténuation de sa peine quand il savait qu’il avait perdu : «Caïn répondit au Seigneur : «Ma punition est trop dure, je ne peux pas la supporter.» (V.13 NL). C’est la première demande de pardon dans la Bible ! Dieu lui fait alors un signe qui doit le protéger et le maintenir en vie. Le signe de Caïn. C’est un signe qui rappelle le meurtre. Mais c’est aussi un signe pour vivre et continuer à vivre. Caïn reçoit de Dieu une deuxième chance : tu vivras, tu seras certes marqué, mais tu vivras. Ce ne sera certes plus la même vie qu’auparavant. Tu seras inconstant et fugitif sur terre – une vie au pays de Nod, c’est-à-dire au pays de l’agitation, au-delà de l’Eden (v.16). Dans son amour et sa miséricorde, Dieu cherche à atteindre des personnes qui ne le méritent pas, dont la nature est endurcie et réticente. Dieu n’abandonne jamais personne. Et une fois de plus, nous crions en nous : c’est injuste ! Il n’est pas possible et ne doit pas être possible qu’une telle personne reçoive simplement le pardon.
Cet acte est une référence à Jésus-Christ qui, bien des années plus tard, a payé sur la croix pour toutes les fautes de l’humanité. Il a ainsi posé la base juridique du pardon de toutes les fautes et de tous les manquements. Tout péché peut être pardonné – tout péché – à condition que l’homme accepte le pardon. C’est vraiment injuste ! Mais soyons honnêtes ; si ce n’était pas le cas, nous serions tous à la merci de la justice. Merci à Dieu qui nous donne une deuxième chance. Ce n’est pas en tant que marqués, mais en tant qu’accomplis que nous pourrons plus tard retourner en Eden, dans la présence de Dieu !
Avec Karl-Heinz Ronecker, nous pourrions prier :
Nous ne sommes pas Caïn, Seigneur.
Nous n’avons pas tué notre frère.
Mais nos mots sont souvent aussi tranchants que des couteaux.
Nous ne sommes pas Caïn, Seigneur.
Nous n’avons pas jeté la pierre aux autres.
Mais en pensée, nous les avons copiés et humiliés du regard.
Nous ne sommes pas Caïn, Seigneur.
Nous n’avons pas de sang sur les mains.
Mais par indifférence et aveuglement, nous les avons abandonnés,
qui ont eu besoin de notre aide.
Questions possibles pour les petits groupes
Lire le texte biblique : Genèse 4,1–15
- Comment réagis-tu au fait qu’il y a tant d’injustice dans ce monde ? Dieu est-il injuste ?
- Pourquoi Caïn avait-il l’impression que Dieu n’acceptait pas son sacrifice ?
- Où vois-tu le lien entre le péché d’Adam et Eve et celui de Caïn ? (Mot-clé : le plus important des commandements [Luc 10,27]).
- Quel comportement serait utile dans une phase aussi terrible et dépressive que celle vécue par Caïn ?
- Qu’est-ce qui a changé grâce à Jésus dans la thématique du pardon ?